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Du Nickel en Corse... à exploiter ou pas ?

Dénoncé par des associations comme par la population pour les risques environnementaux, sanitaires, et les problématiques juridiques qu'il pourrait poser, le projet d'extraction minière au large du Cap Corse de l'entreprise Aurania peine à séduire. La faute, pour majeure partie, à une désinformation du grand public, selon son responsable, Stefan Ansermet.

Du nickel sera-t-il bientôt extrait des plages de Nonza et d'Albu, dans le Cap Corse ? Porté par la société Corsica Ressources - filiale de l'entreprise canadienne Aurania -, le projet d'extraction minière rencontre depuis plusieurs mois une vive opposition.

L'association de défense de l'environnement U Levante dénonce ainsi un risque lié à la présence d'amiante. Le mouvement indépendantiste Nazione "l'opacité" du programme. Les maires des communes concernées ont récemment fait connaître leur opposition, et une pétition appelant à son abandon récolte à ce jour plus de 21.000 signatures.

Pourtant, selon son responsable, Stefan Ansermet, le projet représenterait une opportunité "hors du commun" pour l'île. Ce minéralogiste suisse revient pour France 3 Corse ViaStella sur la polémique qui entoure ce programme minier, qu'il estime majoritairement due à une désinformation du public.

Quand et comment est né ce projet d'extraction minière ?

Stefan Ansermet : J'en suis à l'origine. Une chose extrêmement importante à préciser, c'est qu'à ce jour, aucune demande n'a été déposée, nous en sommes encore au stade de la concertation. En 2023, je découvre par le biais d'un rapport du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) daté des années 1960 que l'awaruite, un minéral composé de nickel et de fer, se trouve en importante quantité en Corse.

Je me suis rendue en Corse, au niveau de ces plages du Cap, et j'en ai transmis des photos au patron de l'entreprise Aurania qui a tout de suite compris qu'il s'y trouvait probablement un gisement de sable magnétique. Ce qui est particulièrement intéressant, c'est que les teneurs en nickel sont très élevées sur ces deux plages, et bien supérieures à celles sur les gisements de roche dure dont nous avons la connaissance.

De quoi parle-t-on exactement ? Comment se matérialiserait cette extraction ? 

Stefan Ansermet : D'après les capacités de traitement et le volume des plages, nous avons calculé que cela devrait prendre 10 ans, sous réserve de surprises. Pour expliquer le processus, il s'agirait d'extraire le nickel du sable des plages au moyen d'une suceuse relié à une barge de 20 mètres environ. Une suceuse, c'est un gros tuyau qu'on utilise par exemple dans les fouilles archéologiques et qui aspire le sable sous l'eau.

Il y aurait ensuite un tri effectué pour retirer seulement partie la plus fine, puis avec un système magnétique, on retirerait le nickel. Tout se ferait depuis la mer, sans atteinte sur la terre. On estime qu'environ 10% de la plage serait retirée par cette exploitation. Ce qui veut dire qu'on ne la ferait pas disparaître. Il est même possible que cela ne se voit pas.

Quand avez-vous contacté les maires des communes de Nonza et Ogliastro ? 

Stefan Ansermet : Dès les premières réflexions autour de ce projet, il nous a semblé essentiel de les rencontrer, pour savoir s'ils n'étaient pas contre. Alors début 2024, nous avons convenu d'un rendez-vous, et nous avons été bien accueillis par les élus, qui voyaient positivement le programme.

Ce qui a tout de suite été essentiel pour nous a été de chercher à résoudre les problèmes de royalties, ou de redevance par rapport à ces extractions. Le gisement potentiel étant situé dans le domaine marin, la redevance minière éventuelle ne reviendrait pas aux communes mais directement à l'Etat. Il était pour nous évidemment impensable de leur demander d'autoriser une extraction sans qu'elles ne puissent en tirer le moindre avantage.

Nous avons donc eu l'été dernier plusieurs rendez-vous au ministère, en compagnie ou en visioconférence avec les maires, et nous avons obtenu l'assurance que ce point est résolu, et que les royalties reviendraient aux communes.

À combien ces redevances pourraient-elles s'élever ? 

Stefan Ansermet : C'est assez difficile à dire précisément pour le moment, parce que nous nous basons pour l'instant sur des calculs en fonction de ce que nous avons observé en teneur sur la surface des plages.

Mais cette teneur est-elle la même partout, ou a-t-elle tendance à augmenter ou diminuer en fonction des endroits ?

Cela reste à déterminer, et nous ne pourrons répondre à la question qu'en effectuant des forages carottés pour connaître la composition précise des sols. 

Mais ce que je peux d'ores et déjà dire c'est que l'on parle de sommes considérables. La France métropolitaine n'a jamais eu de mines de nickels, donc les redevances qui en découleraient restent encore à fixer par le ministère. Mais si on part sur un calcul autour de 1 à 2%, cela représente un montant énorme pour les communes.

Les plages de Nonza et d'Albu ont été créées à partir des déchets de la mine de Canari, qui exploitait de l'amiante. Le site du BRGM les répertorie d'ailleurs comme des lieux à risque d'amiante environnemental très élevé. L'association U Levante dénonce dans ce projet l'existence, dans ce cadre, d'un danger...

Stefan Ansermet : Bien sûr, connaissant l'histoire de ces plages, et le fait, donc, qu'il s'agit de rejets d'une carrière d'amiante, la question nous a tout de suite préoccupés. Mais considérant qu'il est possible d'extraire magnétiquement le nickel et sous l'eau, la problématique de l'amiante ne peut pas se poser.

Nous avons proposé, en 2024, de rencontrer les membres d'U Levante pour leur expliquer notre projet. À notre grande surprise, ils ont refusé, en nous disant qu'ils n'avaient pas l'habitude de consulter les parties prenantes sur ce genre de dossier. C'est à mon sens bien dommage, parce que ce projet est hors du commun, et justement du point de vue écologique extraordinaire.

Il s'agirait de la première mine de nickel au monde qui en extrairait sans la moindre pollution chimique, quand le processus habituel est connu pour être extrêmement polluant. Ici, nous avons un cas unique où nous pourrions tout faire avec un aimant. Nous sommes donc catégoriques sur le fait qu'il n'y a pas de danger concernant l'amiante.

Qu'est-il de l'impact possible sur la biodiversité ?

Stefan Ansermet : Nous avons mandaté une entreprise spécialisée pour engager une étude d'impact assez large, tant en mesurant les courants, qu'en étudiant ce qu'il en est de la faune, la flore... Celle-ci n'a pas encore commencé. Mais nous avons déjà rencontré la directrice du parc marin, qui nous a exposé tous les points qu'il fallait vérifier et tous les problèmes potentiels qui pourraient découler de l'installation.

Nous avons également rencontré tous les services impliqués dans le cadre d'une éventuelle exploitation. Nous sommes au courant de tous les obstacles à prendre en compte, et nous les prenons très au sérieux.

Une pétition à l'encontre du projet récolte plus de 21.000 signatures. Les deux maires des communes ont récemment fait part de leur opposition à ce programme minier. Leur accord n'est néanmoins pas nécessaire, l'Etat étant seul à donner le feu vert...

Stefan Ansermet : Il serait impossible pour nous de mettre en œuvre ce projet sans l'appui d'une partie importante de la population. C'est totalement exclu. Je pense qu'aujourd'hui, la majorité des gens qui sont opposés au projet le sont parce qu'ils n'ont pas eu toutes ou les bonnes informations, et n'ont entendu parler que les détracteurs. Nous avons besoin de plus largement communiquer.

Ce qui fait peur aux gens, ce sont aussi les nuisances, qui seront réelles, il est vrai, au niveau du bruit, mais nous avons déjà validé à l'époque avec les maires en condition sine qua non que les travaux ne se déroulent qu'en hiver. Je sais qu'il y a aussi eu l'idée que nous sommes des spéculateurs étrangers venus pour piller les ressources de la Corse... Mais ce n'est pas le cas. Notre rêve, ce que serait que cela puisse se faire avec les Corses et avec le gouvernement corse. Il s'agirait de la situation idéale.

Ce qui me rend optimiste, c'est qu'à chaque fois que nous avons présenté le programme, nous avons toujours été très bien reçus. Nous avons donc bon espoir.

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